A qui revient la charge mentale de l'écologie ?

Préparer des repas fait maison, acheter des aliments bio et locaux, privilégier les objets de seconde main, toutes ces actions qui permettent de réduire l'impact environnemental de sa famille viennent bien souvent se rajouter à la charge mentale des femmes.

La "charge mentale", qu'est-ce que c'est ?

Le concept de "charge mentale" a été théorisé par la sociologue Monique Haicault en 1984 et massivement popularisé par l’illustratrice Emma en 2017.

La charge mentale est le poids invisible que l'on ressent lorsqu'on doit penser, organiser et planifier des tâches pour soi-même et pour les autres. Elle se manifeste souvent par le fait de toujours avoir en tête la liste des choses à faire, comme gérer les courses, planifier les repas, organiser les rendez-vous, tout en s'assurant que tout le monde autour de soi ne manque de rien. C'est comme être le·la "chef·fe d'orchestre" de la vie quotidienne, souvent sans que cela soit visible ou reconnu par les autres. La charge mentale est particulièrement souvent assumée par les femmes dans le cadre de la gestion du foyer.

Des chiffres qui parlent : la charge mentale portée par les femmes

80 % des femmes indiquent consacrer au moins une heure par jour à la cuisine ou au ménage contre seulement 36 % des hommes, selon les données 2016 de l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes. L’enquête, qui a été réalisée à intervalles réguliers depuis 2003, ne montre pas d'évolution de la situation. Même s'il est possible que les hommes contribuent plus qu'avant à certaines activités ponctuelles, ces résultats indiquent néanmoins que les femmes prennent massivement en charge les activités les plus astreignantes et régulières, comme préparer les repas.

Ces statistiques sont confirmées par l'INSEE, d'après la dernière enquête "Emploi du temps" menée en 2010, les femmes consacrent plus de temps que les hommes aux tâches domestiques et aux enfants : 1 h 26 de plus par jour en moyenne (en ne tenant compte que des femmes et des hommes ayant un emploi).

Et la charge écologique alors ?

A cette charge mentale s'est ajoutée également pour les femmes la charge écologique ; c'est-à-dire les écogestes du quotidien. Par exemple en ce qui concerne l'alimentation, en plus d'organiser les courses et les repas, il faut intégrer des critères de durabilité : choisir des produits locaux, bio, de saison, donc souvent naviguer entre plusieurs lieux de vente, tout en jonglant avec les contraintes budgétaires et les préférences alimentaires de la famille.

Cette "écologie des petits gestes" ne concerne bien sûr pas seulement l'alimentation, mais également l'organisation du recyclage (avoir plusieurs poubelles, savoir quand les sortir...), l'utilisation de produits cosmétiques et ménagers plus écolos (chercher les meilleurs produits, fabriquer des produits soi-même...) ou encore l'utilisation de couches lavables pour les bébés (se renseigner sur les meilleures, en acheter, savoir les utiliser, les laver en permanence pour qu'il y en ait toujours de disponibles...).

Parce qu’ils s'appliquent très largement aux tâches domestiques, les "petits gestes" incombent principalement aux femmes qui en plus d’être comptables de la bonne tenue de la maison et du bien-être de la famille, se trouvent en responsabilité additionnelle que tout ceci soit fait de façon la plus durable possible.

Un déséquilibre à repenser pour un avenir durable

Selon un article de Marie Donzel pour le magazine EVE, partager la charge écologique avec son entourage, c’est commencer par se mettre d’accord sur les objectifs que l’on se fixe dans la contribution du ménage aux défis environnementaux. En effet, une partie de nos charges cognitives peut procéder non tant d’attentes exprimées par notre entourage que de notre vision de ce qui est bon, bien et juste. On peut ainsi établir conjointement les objectifs sur lesquels on est co-responsables. Et si l’un·e ou l’autre veut aller plus loin, c’est son droit mais c’est sur lui/elle que repose la responsabilité d’y penser et de réunir les moyens nécessaires à ses actions individuelles.

La charge écologique, ça se partage aussi en-dehors du ménage. Car si « l’écologie des petits gestes » nous mine parfois le moral, c'est aussi parce qu'ils nous prennent beaucoup d'énergie pour peu de résultats concrets et visibles. Agir aussi pour l’environnement au sein d’une association, d’un collectif, d’un mouvement, en faisant porter une voix plus ample et en menant des actions ambitieuses, ça aide à rendre son travail écologique visible, ça lui donne une portée politique et ça redonne du sens à ce qui est devenue « une charge » dans le cadre intime.

Enfin, le partage inéquitable de la charge écologique a des conséquences en-dehors du foyer : alors que les écogestes sont souvent l'affaire des femmes, les politiques publiques concernant l'écologie sont très majoritairement portées par des hommes (seulement 6 % des postes ministériels en charge des politiques énergétiques et 15 % des conseils du Fonds vert pour le climat sont occupées par des femmes, rapportait France culture en 2020). Les femmes, premières victimes des conséquences du réchauffement climatique dans le monde, ont aussi leur rôle à jouer dans la sphère politique. Mais pour y arriver, elles ne doivent plus être les seules à gérer les affaires du foyer.

Ressources complémentaires : • Observatoire des inégalités - Le partage des tâches domestiques et familiales ne progresse pasNovethic - Avec la charge mentale, la charge écologique est un poids supplémentaire pour les femmes

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